Le droit d(e l)’auteur est une fiction juridique qui tend à pacifier les relations entre les acteurs.

Il a pour premier objectif de transformer toute création intellectuelle en une richesse. Pour arriver à cette fin, le droit crée un monopole légal au bénéfice de l’auteur originel. Un monopole qu’il va pouvoir à son tour monnayer auprès d’ayants droits qui vont financer la création et son exploitation (le producteur), fabriquer (éditeur) sa création, la distribuer (distributeur) jusqu’au client final (l’utilisateur). Tout l’esprit du droit d’auteur est là.

Mais le droit d’auteur français, dit continental, va plus loin.

Au-delà des accords que l’auteur a pu passer avec tel ou tel ayant droit, le droit français donne à l’auteur la possibilité d’agir en Justice pour le respect de sa qualité d’auteur et le respect de son œuvre, même avec ceux avec qui il a contracté : c’est le droit moral de l’auteur inconnu dans le « copyright » anglo-saxon. Le droit moral a ainsi permis à un compositeur de musique Rap d’agir contre l’éditeur de sonneries pour téléphones mobiles, parce qu’il jugeait qu’un extrait de sa composition proposé au téléchargement, portait atteinte à l’esprit de son œuvre. Pourtant, ce compositeur avait donné toute autorisation à un ayant droit pour commercialiser sa création même dans le cas de téléchargements de téléphones mobiles. Le droit moral dépasse le contrat : il est inaliénable, incessible et perpétuel. De quoi donner des migraines aux producteurs, éditeurs, distributeurs et à tous ceux qui font une exploitation commerciale des droits d’auteur.

Le droit d’auteur subit les assauts des technologies de l’information.

En particulier, le droit d’auteur français est fortement empreint d’une idéologie décrite ci-avant, qui ne le rend pas toujours compatible avec les réalités des technologies et des marchés.

Face à cette situation, le législateur a deux solutions :

  1. soit il crée des régimes dérogatoires au droit commun (ex. logiciel, base de données etc. …),
  2. soit il fait mine de ne pas voir les problèmes et continue sur sa lancée, souvent sous la pression des ayants droits des auteurs qui protègent non le droit d’auteur mais leur marché.

C’est cette dernière solution qui a été choisie pour le P2P et les téléchargements massifs consécutifs à la diffusion du haut et très haut débit, aux nouveaux standards de compression etc. …

Mais le droit d’auteur doit se préparer à une nouvelle tourmente, le Web 2.0. De quoi s’agit il ici ? Les consommateurs deviennent auteurs.

Par leurs contributions, les internautes font un apport intellectuel au Web qu’ils consultent, apport qui est protégé au titre du droit d’auteur comme n’importe quelle œuvre littéraire. Cette contribution n’a en effet aucune raison d’échapper aux règles traditionnelles du droit d’auteur.

Autrement dit, l’auteur de la contribution dispose, en l’état de la Loi, sur sa contribution d’un monopole légal qui, s’il est enfreint, est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 100.000 euros d’amende . Le contributeur, s’il apporte sa contribution à un site, ne la cède pas par le simple fait qu’il réalise cet apport. Pour la céder, le code de la Propriété Intellectuelle exige un formalisme très rigoureux difficilement compatible avec l’esprit du Web 2.0.

Certes, l’éditeur du site Web peut tenter d’organiser une cession des droits qui serait acceptée en ligne par le contributeur, mais il n’est pas acquis que les règles très formelles du droit d’auteur français s’appliquent dans ce cas.

Et puis, il y a le droit moral de l’auteur, si sa contribution est détournée dans l’esprit. L’esprit collaboratif et de coopération interdit d’envisager que des esprits chagrins se déchaînent en faisant valoir la Loi. Mais sait on jamais ? Il y a là une insécurité juridique un peu troublante, en l’état du droit d’auteur français. Une nouvelle occasion pour réclamer une simplification des règles, une plus grande souplesse dans la gestion, souplesse aujourd’hui absente.

En conclusions, après le P2P, on recommence ?