Pour illustrer mon propos le lecteur pourra se reporter, notamment, aux articles R 4228-10 et suivants du code du travail qui sont un bijou de textes règlementaires. Le texte traite de ce que les pouvoirs publics appellent « les cabinets d’aisance », c’est à dire le seul lieu où le roi allait tout seul. Chacun appréciera la précision et l’exhaustivité des termes employés dans un langage tout à fait officiel. « Il existe au moins un cabinet d’aisance et un urinoir pour vingt hommes et deux cabinets pour vingt femmes. L’effectif pris en compte est le nombre maximal de travailleurs présents simultanément dans l’établissement. Un cabinet au moins comporte un poste d’eau. Dans les établissements employant un personnel mixte, les cabinets d’aisance sont séparés pour le personnel féminin et masculin. Les cabinets d’aisance réservés aux femmes comportent un récipient pour garnitures périodiques. Les cabinets d’aisance ne peuvent communiquer directement avec les locaux fermés dans lesquels les travailleurs sont appelés à séjourner. Ils sont aménagés de manière à ne dégager aucune odeur. Ils sont équipés de chasse d’eau et pourvus de papier hygiénique. Les cabinets d’aisance sont aérés conformément aux règles d’aération et d’assainissement du chapitre II et convenablement chauffés. Le sol et les parois sont en matériaux imperméables permettant un nettoyage efficace. L’employeur fait procéder au nettoyage et à la désinfection des cabinets d’aisance et des urinoirs au moins une fois par jour. Les portes sont pleines et munies d’un dispositif de fermeture intérieure décondamnable de l’extérieur. Les effluents sont évacués conformément aux règlements sanitaires ». Chacun pourra vérifier si son employeur est bien conforme à la Loi. A défaut, on doit savoir que des contraventions sont attachées à la violation de telles dispositions et que dans l’intervalle on est prié de trouver un autre cabinet de réflexion. Les lavabos, les vestiaires, les douches, le nombre de sièges dans la salle de repos, la présence ou pas de dossiers au siège etc. … sont d’autres textes issus de ce code d’une précision tout à fait similaires et au final le nombre de textes composant ainsi le code du travail est incalculable. On me rétorquera, sans doute à raison, que certains employeurs français ont besoin d’une telle précision et d’une sanction associée, pour le respect de la personne humaine même lorsqu’il ne s’agit que d’un salarié … 🙂 C’est sans doute vrai. Mais on ne peut manquer de s’interroger sur l’avenir de telles dispositions et d’un code de travail mis à rude épreuve dans un monde travaillant en réseau où certains employeurs délocalisent la saisie de données en Inde, la mise à jour de telles bases de données à Maurice et le SAV au Maroc pour, justement, s’affranchir des dispositions contraignantes de la législation du travail. Mais il y a plus : la société en réseau étant parmi nous, le code du travail est attaqué de l’intérieur. Le repos dominical est notre exemple du jour. Le code du travail impose un repos hebdomadaire « de 24 heures consécutives » qu’il impose, pour des raisons historiques liées aux origines chrétiennes de notre société, « le dimanche » . La règle impérative, régulièrement sanctionnée par les Tribunaux saisis soit par des inspecteurs du travail qui dressent des procès-verbaux … le dimanche. C’est souvent le cas dans des rues commerçantes de grandes villes françaises, la rue des Francs-Bourgeois et ses commerçants, par exemple, dans le quartier du Marais à Paris s’illustre régulièrement par cette guerre incessante entre l’inspection du travail et les commerçants locaux. Les Tribunaux sont aussi souvent saisis par les syndicats, le plus souvent dans le secteur de la grande distribution et obtiennent également très souvent des fermetures le Dimanche sous astreinte, c’est à dire que si l’ouverture est maintenue le magasin est condamné à payer une pénalité très souvent importante. Mais qu’en est il des boutiques en ligne, ouvertes quant à elles 24H/24 et sept jours sur sept au mépris de cette réglementation. Pire encore, les commerçants du monde réel pourraient légitimement se plaindre d’une concurrence déloyale des boutiques on-line. Les unes sont interdites à l’ouverture, les autres prennent des commandes et parfois livrent le jour fermé. La question est une vraie question de sociétés et de valeurs. Le repos dominical est une avancée sociale certaine que personne ne veut ni n’a intérêt à remettre en cause. Comment alors résoudre cette apparente difficulté voire inégalité entre le monde réel et le on-line ? Il y a deux façons de faire. La première est la façon « contrefaçon de droits d’auteur ». Il s’agit de faire pour le droit du travail, ce qu’on a fait pour la musique et la vidéo depuis quelques années, aggraver les peines, prévoir une riposte graduée, des mesures de coercition sur les fournisseurs d’accès pour s’assurer leur collaboration et obtenir des e-boutiques la fermeture le jour du seigneur. Chacun a compris que la partie est perdue par avance. L’autre façon de faire est de laisser les machines travailler, même le Dimanche et de s’assurer en revanche qu’aucune main d’œuvre humaine n’est associée à ce travail. A notre connaissance, les pouvoirs publics, législateur y compris, n’envisagent pas de solutions autres. Une façon harmonieuse de traiter le problème.