D’un côté, des ressources, les fréquences, sous contrôle étatique, gérées, comme c’est le cas en France, par un établissement public (Anfr) qui la planifie jusqu’à une autorité administrative indépendante (l’affectataire), le CSA ou l’ARCEP, qui les attribue notamment dans le domaine de la radio pour la première, des télécoms pour la seconde.

De l’autre, une ressource mondiale, gérée par une société de droit californien à but non lucratif, l’Icann , au niveau mondial. L’Icann utilise l’outil juridique du contrat pour confier la gestion du petit suffixe en fin de nom (.com, .net, .biz. Info, .fr etc. …) à des organisations de droit privé de divers Etats autour de la planète (le registry ou unité d’enregistrement), lesquels eux même, toujours par contrat, en confieront le plus souvent la distribution à d’autres organisations privées (les regitrars ou bureaux d’enregistrement). Ces registrars passeront enfin, contrat avec le titulaire du nom de domaine, dans un contrat dit d’enregistrement, lequel exploitera le nom de domaine qui lui est ainsi attribué, pour toutes sortes de services.

On trouvera d’un côté, des actes le plus souvent réglementaires, pour l’attribution et l’exploitation des fréquences. De l’autre côté, c’est par une chaine de contrats de droit privé cohérente, c’est-à-dire que chaque contrat reprend au minimum les dispositions obligatoires du précédent, que se trouve régulée l’attribution et l’exploitation des noms de domaine.

Mais à y regarder de plus près, on est en réalité surpris de voir que les différences ne sont pas aussi marquées.

Il serait trop facile de faire valoir qu’une ressource est sous contrôle étatique et que l’autre est dans le libre marché parfaitement ouverte à la concurrence.

En clair, l’une est à la mode et a bonne image, l’autre pas

Non, derrière l’Icann se trouve bien une gestion publique de cette ressource qu’est le nom de domaine.

En effet, la création de l’Icann en 1997, est le fait du Department Of Commerce (DOC), le ministère du commerce des Etats-Unis d’Amérique.

A l’époque, l’annonce avait été faite que cette omniprésence gouvernementale états-unienne était provisoire. Seize ans plus tard, rien n’a changé. L’Icann tient ses droits et sa vie même, au gouvernement américain, lequel dispose d’un véritable droit de véto sur toutes décisions de son conseil d’administration. L’ONU, un temps, a bien tenté de reprendre la main comme pour les télécoms avec l’UIT, en vain. Il est vrai que la fonction occupée par l’Icann est hautement politique. Lorsque la Croatie ou la République Démocratique du Congo, après que la Yougoslavie ait explosé ou après disparition du Zaïre du fait du renversement de son régime, ont demandé la création d’un domaine géographique, la décision d’accepter ou pas la création de ce domaine national s’heurtait à des oppositions politiques qui ont été tranchées à Washington.

Il est vrai aussi que la stabilité de l’Internet dépend du système de nommage. Si les principaux services du réseau, Web et courriels, fonctionnent sans difficultés, que toute requête ou émission arrive à son destinataire sans difficultés, c’est parce qu’un annuaire (l’arbre de nommage) est partagé par tous les routeurs du monde entier, et que cet annuaire est géré par l’Icann . Les détracteurs du système actuel font valoir l’extrême dépendance des réseaux à un seul Etat et font valoir que demain, un seul domaine, tel que notamment le .fr, pourrait en théorie par simple « delete » disparaître de la surface des réseaux avec les conséquences économies monumentales que l’on peut apercevoir.

Fréquences et noms de domaine, ont donc beaucoup plus de points communs qu’on ne le pense.

Mais quand l’un est soumis à une gestion publique dans une relative transparence, l’autre obéit à une gestion opaque dont on pourrait demain avoir à se plaindre. (Article publié sur le site Radio Actu)