Car la proposition de directive, récemment amendée par l’EuroParlement, annonce en préambule son but. Il s’agirait de créer « un environnement favorable à l’innovation et à l’investissement » d’où résulterait une « sécurité juridique ». Or, c’est tout le contraire qui risque de se passer et ce, pour trois raisons. Dès la brevetabilité du logiciel admise, tout auteur de logiciel, individu, PME ou grande entreprise, ne pourra développer de nouveaux logiciels sans s’enquérir au préalable de l’existence ou non d’un brevet qui pourrait lui être opposé. Il s’adressera alors à un professionnel, conseil ou Avocat, pour lui demander d’établir une recherche d’antériorité dans la liste des brevets existant. La réponse du professionnel sera à tout coup évasive ou assortie de réserves. Pour des raisons de responsabilité, aucun conseil ne se risquera en effet à écrire que tel logiciel est disponible pour être ensuite contredit par un Tribunal. Que fera alors l’auteur de logiciel ? Il risque de ne rien faire ou, en tout état de cause, il vivra mal cette situation. Où est dans ces conditions la sécurité juridique ? Deuxième élément d’insécurité : le pauvre logiciel n’en finit pas d’empiler des protections juridiques différentes. C’est le droit d’auteur et demain, peut être, le droit des brevets. Ces deux protections principales devraient coexister. Elles ont pourtant des règles différentes sur des mêmes questions : le régime des créations de salariés, chacune a sa saisie contrefaçon, les règles de compétence des tribunaux sont également différentes. Toute une série de questions qui trouveront alors des réponses différentes voire contradictoires. Où est la sécurité juridique ? La Commission, puis le Parlement, ont tenté de résoudre une de ces contradictions. La loi sur le droit d’auteur autorise un utilisateur régulier à décompiler un logiciel dans un but d’interopérabilité, même contre l’avis de l’auteur du logiciel. Que va-t-il advenir de cette règle avec le brevet ? Enfin, la sécurité juridique va de pair avec la simplicité. Des règles comprises de tous. Le projet de directive communautaire était difficile à lire : amendé il devient « impossible » à lire de par sa complexité. Or, seules des règles claires peuvent amener à la sécurité. A défaut, nous entrerons dans un monde de « lawyer » c’est à dire un monde complexe fait pour les seuls techniciens. Oui, la seule façon de permettre « un environnement favorable à l’innovation et à l’investissement », est le retrait pur et simple de cette proposition de directive et l’affirmation selon laquelle le logiciel n’est pas brevetable. Le droit d’auteur applicable au logiciel pourrait quant à lui évoluer et mieux s’adapter aux besoins de l’industrie. C’est là une question de pragmatisme sans rapport avec le logiciel libre…